KI TISSA

Un titre, une paracha : Ki tissa

Par Michel Bensoussan

Un résumé

Moshé reçoit l'ordre de prélever un demi-shekel lorsqu'il devra compter (ki tissa) les enfants d'Israël. Cela servira à financer les sacrifices et l'entretien du Mikdash (par la suite, ce demi shekel sera, plus tard, prélevé aux alentours de Pourim, avant le début de chaque année). Moshé reçoit l'ordre de construire le dernier ustensile manquant au Michkan : le « Kior », petit réservoir d'eau pour l'ablution des pieds et des mains des cohanim à l'entrée du Kodech. Moshé reçoit l'ordre de préparer l'huile lustrale qui enduira tous les ustensiles du Michkan,  ainsi que les cohanim, afin de les sanctifier avant leur entrée en fonction. Betsalel est choisi pour être le maître d'œuvre de la construction du Michkan. Cette construction, et ses 39 travaux, devront d'ailleurs être interrompus le jour du shabbat.

Ces recommandations sont les dernières reçues par Moshé au sommet du mont Sinaï. Il doit à présent (le 17 Tammouz), 40 jours après le spectaculaire don de la Torah (le 6 Sivan), redescendre vers le peuple. Mais entre temps, en bas, Aaron avait beaucoup de mal à contenir l'impatience du peuple. Un malentendu à propos de l'heure d'arrivée de Moshé avait déclenché un soulèvement général. Un veau en or est fabriqué et le peuple commence à l'adorer. En voyant cela, Moshé jette de ses bras les Tables de la Loi qu'il avait reçues et les brise. C'est la plus grande crise à laquelle le peuple est confronté. Sur ordre de Moshé les Lévi tuent les fauteurs de troubles. Il y a trois mille morts. Le veau d'or est détruit. Moshé implore le pardon de Dieu et  prononce les treize attributs de miséricorde qui sont, jusqu'à nos jours, invoqués dans nos prières. Dieu accorde son pardon et demande à Moshé de remonter sur le Sinaï 40 jours supplémentaires pour recevoir deux autres Tables de la Loi. Lorsque Moshé est descendu, son visage irradiait à tel point qu'il devait mettre un masque pour protéger les personnes qui le voyaient.

Réflexions à propos du titre

Ki Tissa, littéralement : « lorsque tu élèveras… la tête des enfants d'Israël » est généralement traduit par « lorsque tu voudras compter… ». Or, il y a un second terme, difficile à traduire lui aussi, dans le même verset : « Lifkod », généralement traduit par « compter », ou parfois aussi « se souvenir de », ou même « donner un ordre ». Ou plus rarement « se faire remarquer par son absence ». Dans tous les cas, une personne en particulier est mise en exergue. Elle sort de l'ensemble. Lorsqu'elle n'est qu'un élément  d'un groupe ou d'un peuple, la personne est protégée par cet anonymat. En la comptant, elle commence certes, à compter ! Mais elle est aussi sujette au jugement (pas toujours bienveillant) des autres. Une « tête élevée » peut donc être source de promotion ou de son contraire ! Lorsque Joseph avait prédit l'avenir des deux ministres de Pharaon, il avait dit à l'un que « sa tête serait élevée » et qu'il serait réhabilité dans ses fonctions. S’adressant à l'autre, il avait utilisé le même terme : « sa tête sera élevée »… pour être pendue !!

Moshé doit donc être conscient de la lourde tache qui lui incombe lorsqu'il va compter chaque personne. C'est comme s'il « recevait » la responsabilité de cet acte (cf. Onkelos et Rachi). Comme si donner un ordre à quelqu'un devait responsabiliser autant que d'en recevoir un. D'autre part, recevoir un commandement, une bénédiction, recevoir la Torah, comporte aussi énormément de risques. Une tête élevée, cela peut faire « tourner la tête » ou même nous la faire perdre ! C'est peut-être la raison pour laquelle nos Sages ont donné ce titre à la Sidra qui relate la faute du veau d'or.

Un résumé PAR MONTEES  de la Sidra : Ki Tissa

Par Michel Bensoussan

Placée au cœur des quatre Sidrot qui traitent de la construction d'un sanctuaire pour Dieu, notre Sidra relate la faute du veau d'or. Comme s'il fallait montrer les dangers des débordements humains face à la matérialisation de la présence divine.

Première montée : En cas de dénombrement du peuple, on comptera des pièces d'argent (un demi-shekel) offert par chacun, plutôt que de compter les personnes elles-mêmes. Un dernier ustensile, "oublié" dans la Sidra Térouma est ici ordonné, il s'agit du Kior : bassin d'eau grâce auquel les Cohanim se laveront les mains et les pieds avant d'entrer dans le Kodech (tente d'assignation). Pour sanctifier tous les ustensiles du Michkan et les Cohanim, Moché doit préparer une huile d'onction parfumée. D'autre part, il faudra préparer onze épices qui, une fois moulues et mélangées, constitueront la Kétorèt, l'encens. Betsalel est désigné  "maître d'œuvre" de la construction du Michkan. Celle-ci sera interrompue le jour du Shabbat.

Deuxième montée : Quarante jours après la déclaration des dix commandements, Moché doit descendre de la montagne avec les Tables de la Loi. Or, pendant les quelques heures de son retard, le peuple impatient pense que Moché l’a abandonné et cherche déjà un intermédiaire qui le remplacera. Pour gagner du temps, Aharon leur demande de ramasser leurs bijoux en or. Le peuple obtempère si vite qu'il doit jeter l'or dans un creuset, et il en ressort un veau en or. Dieu demande à Moché de s'activer et de descendre voir la catastrophe qui se déroule au bas de la montagne. Dieu est sur le point d'anéantir le peuple pour faute d'idolâtrie. Moché intercède déjà et l'argument qui apaise la colère de Dieu est  le "qu'en dira-t-on" des autres peuples ! Lorsque Moché redescend et qu'il voit les danses et le veau d'or, il jette de sa main les Tables, qui se brisent. Il ordonne aux Levi de tuer les coupables (il y aura trois mille morts).

Troisième montée : Une longue discussion entre Dieu et Moché redéfinit les limites du "rapprochement" possible entre Dieu et l'homme.

Quatrième montée : Moché demande et obtient de "connaître" un peu plus Dieu.

Cinquième montée : Dieu ordonne à Moché de tailler lui-même de nouvelles Tables et de remonter passer quarante jours sur le mont Sinaï. À cette occasion Moché implore le pardon de Dieu pour la faute du veau d'or. Il prononce les treize attributs de miséricorde que l'on utilise encore aujourd'hui  dans nos prières quotidiennes et le jour de Kippour.

Sixième montée : Dieu accepte et pardonne au peuple. Une nouvelle alliance est établie. Elle renforce l'interdit de toute idolâtrie. Les trois fêtes (Pessah, Souccot et Chavouot) seront l'occasion, en terre d'Israël, de réunir le peuple dans la maison de Dieu.

Septième montée : Dieu ordonne à Moché d'écrire les termes de la nouvelle alliance. Après quarante jours, (le jour du grand pardon – Kippour), Moché redescend avec les nouvelles Tables, sur lesquelles les Dix Paroles sont écrites de la main de Dieu. Lorsque Moshé descend, le peuple s'aperçoit que son visage illuminait. Moshé a donc confectionné un masque protecteur pour ne pas éblouir les personnes qui le regardaient.

Shabbat Para

Ce Shabbat, nous sortons un second Sefer Torah pour y lire le passage de "Para" – la vache rousse. Ses cendres sont un élément essentiel du processus de purification. Étant donné la proximité de la fête de Pessa'h et du devoir de sacrifier l'agneau pascal au Temple, en état de pureté, la lecture de ces lois est faite devant tout le peuple ce
Shabbat, un mois avant Pessa'h.